mardi 12 janvier 2016

Repos géopolitique en Kiribati fidjienne

Depuis plusieurs numéros, le rédacteur en chef de Timbres magazine, Gauthier Toulemonde, tente d'attirer les lecteurs pour les particularités de certains territoires français, ayant été revendiqués en vain par la France ou possédés par des citoyens français à partir du livre de Bruno Fuligni.

Une source d'idée d'histoire postale très ciblée ou d'une collection thématique exigeante... voire d'une réflexion personnelle sur ce qu'est un « pays » en philatélie et en histoire postale.

Mappemonde de Martin W. Lewis listant une partie des bizarreries de souveraineté dans les États du monde actuel (avec son aimable autorisation, GeoCurrents.info)
Les amateurs de territoires au statut étrange se reporteront également vers les « bizarreries géographiques » d'Olivier Marchon qui dépassent l'espace français : de la localisation floue du Mont Blanc sur la frontière franco-italienne, du statut-parasite de la citadelle de Kowloon parcelle chinoise abandonnée au cœur de la colonie britannique de Hong Kong, une voie ferrée belge zigzaguant en Allemagne après le traité de Versailles, sans compter les ahurissants tracés et habitudes des habitants en conséquence des frontières belgo-néerlandaise, franco-suisse, indo-bangladaise (qui est un cauchemar permanent pour les habitants des milliers d'enclaves), etc.

Sur le planisphère ci-dessus, un géographe états-unien a listé une partie des exceptions au système étatique qui est censé servir de base à la géopolitique mondiale... Sur son site GeoCurrents.info, Martin W. Lewis présente, entre autres, des articles généraux et des études de cas sur comment l'idée d'États-nations est une conception limitée - et encore... - aux pays occidentaux.

Appliquée dans le monde actuel, elle connaît des limites qui expliquent les échecs de tentative de démocratiser des États (Afghanistan, Irak) en croyant que ce sont des blocs pays-nation-gouvernement. Une de ses conférences à l'Université de Stanford est visible sur youTube depuis novembre 2015 et appuie sur quelques exemples d'États plus ou moins unis, viables, indépendants,... Certains connus des philatélistes mais pas des États du monde (Taiwan ? Somaliland ?).
Timbre de Kiribati de 1984 représentant l'île Banaba (colnet.com, site-catalogue d'objets de collection, au fonctionnement collaboratif).
Comment revenir à la philatélie... Une série d'articles de Lewis est consacrée, en novembre 2015, à Kiribati, ce qui ne manquera pas de réveiller les amateurs de l'Empire britannique : 1, 2 et 3.

En particulier, le premier du vingt-quatre novembre explique la particularité de l'île Banaba, isolée à l'extrême-occident du pays-océan et de l'archipel des Gilbert. Sous le nom d'Ocean Island, elle est connue, comme sa voisine Nauru, pour ses réserves de phosphate exploitées par les Britanniques jusqu'à l'indépendance de Kiribati en 1979.

Sauf que les habitants de l'île sont coupés en deux : une minorité vit sur l'île pour garantir le maintien de la propriété ancestrale de leur peuple, majoritairement installé à Rabi, dans les îles Fidji. Rabi, une île qu'ils ont collectivement acheté pour se reloger suite à l'activité minière et à la menace d'occupation japonaise...

Bref, une île kiribats gérée par un conseil de huit représentants installés aux Fidji, citoyens fidjiens mais qui conservent des passeports kiribats...

Et le gouvernement français qui essaie de gérer la double nationalité des terroristes...

En attendant, à part vendre des timbres-poste, le gouvernement de Kiribati ne peut lancer aucun projet sur l'île - un des sommets du pays, fort utile en cas de montée du niveau de l'océan Pacifique - sans l'accord de ses propriétaires, dans une zone du monde où la propriété ancestrale collective a du sens.

Dans cette relation compliquée entre Banabans et Kiribati, voilà qu'arrive l'État-nation à l'européenne : ces dernières années, une partie des Banabans souhaitent le rattachement de leur île à Fidji, très loin au sud...

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