dimanche 10 décembre 2017

Vers où se dirige Stanley Gibbons ?

Dans les épisodes précédents de la chute vertigineuse du cours en bourse de l'auguste compagnie philatélique londonienne Stanley Gibbons : d'hasardeux et coûteux tournants e-commerce et diversifications, un nouveau directeur philatéliste au cœur du métier initial, la fin de l'aventure à Guernsey. La reprise après les montagnes russes...

Si seulement !

Pourtant, dans les derniers jours de novembre 2017, le siège social londonien a annoncé la mise en faillite de l'ancienne, éphémère et catastrophique maison-mère anglo-normandes. Tout pour rassurer les investisseurs, les consommateurs et le public philatélique que Stanley Gibbons, c'est le leader du catalogue, du magazine et de la vente de matériels et de timbres du Royaume-Uni et du Commonwealth !
Le cours de l'action Stanley Gibbons ces trois dernières années (capture d'écran du dimanche dix décembre 2017 sur le site du London Stock Exchange).
Même avec l'échelle à trois ans, il est visible que le titre chute encore : de sept pence sterling quand Harry Wilson a repris la main en juillet 2016 à trois pence et quelques ces derniers jours, en décembre 2017...

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Le marchand Ian Billings a magnifiquement rédigé un résumé historique, le mercredi vingt-neuf novembre dernier, toute cette pitoyable aventure du capitalisme actuel en insistant que ce n'est pas la première fois que des Golden Boys tente en vain de faire grossir en vain la grenouille pour lui tirer le profit d'une vache à lait.

À la lecture de son texte, des deux fils de discussion du forum anglophone StampBoards (un sur le cours de bourse, l'autre sur l'avenir du catalogue), j'en déduis que les investisseurs ont temporairement compris qu'une compagnie qui vend ses plus récentes acquisitions à perte n'est actuellement pas rentable et ne versera pas de dividendes avant longtemps. Les gros investisseurs aiment le cash immédiat, les petits bons pères de famille qu'on leur donne peu mais régulièrement.
Le cours à un mois, vraiment pour ceux qui ne cliquent pas sur les liens pour vérifier (capture d'écran du dimanche dix décembre 2017 sur le site du London Stock Exchange).
De là, le problème de la faillite guerniaise - oui, un jeu de mots pourri - est qu'elle marque apparemment la fin du système de placement en timbres luxueux au profit garanti par la revente à des enchères incroyables de timbres bien cotés. Certains parlent de pyramide de Ponzi, où les nouveaux convertis financent les revenus des anciens ; les suppléments finance/épargne des grands quotidiens nationaux rappelant simplement l'aspect irrationnel du marché des biens de collection.

Si la faillite de SG Guernsey entraîne celle du fond de placement en timbres, que vont devenir les dits timbres et leurs « propriétaires investisseurs » ?... La réputation du marchand va en prendre un coup si ça tourne à l'Afinsa ou l'Aristophil...

S'ajoute à cela la rumeur que le loyer de la boutique emblématique du Strand, au cœur de Londres, pèse lourd et est menacé d'augmentation par le bailleur. Comme d'autres, Stanley Gibbons accueillera-t-elle bientôt les commandes et les clients uniquement à la campagne et sur les salons ?

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La communauté des collectionneurs s'inquiète davantage de ce qui fait la valeur à leurs yeux de la compagnie plus que sesquicentenaire : le magazine Gibbons Stamp Monthly et les différents tomes du catalogue.

Les seconds sont loin de la numérisation et de l'impression par pays à la demande, entamée par la concurrence des autres références : Michel, Scott et Yvert. Alors qu'actuellement, des très spécialisés catalogues par règne britannique aux spécialisés par anciennes colonies de l'Empire, les ouvrages de Stanley Gibbons sont d'une haute qualité et mis à jour régulièrement. Même avec quelques erreurs et interprétations de cotes - qui n'en fait pas ? -, son French Colonies de 2016 soutient la comparaison face au maître Yvert et les tomes suspendus de Dallay-Maury, d'après l'étude rédigée par Michael Round parue dans le cent-unième numéro de Cameo, le journal du West Africa Study Circle, daté juin 2017.

Malgré la qualité du travail de sa rédaction et des philatélistes participants, le premier en est, par nécessité, réduit à l'expédition en seconde classe et à inciter l'abonné à prendre en sus ou à la place l'abonnement numérique.

Sur ce plan-là, Gibbons Stamp Monthly est user-friendly - « facile d'usage » pour les lecteurs attristés de Jean d'Ormesson : l'abonné en ligne a accès à l'ensemble des numéros au format pdf depuis 2010, en entier ou article par article. Ne pas oublier les sauvegardes de sécurité sur un disque dur externe ou le « nuage » quand vous ne renouvelerez plus votre abonnement.

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La disparition du pôle publication avec une faillite générale de Stanley Gibbons serait tragique... même s'il y aura toujours des concurrents ou des ambitieux - voir les réincarnations d'Arthur Maury - pour racheter la marque, les droits d'auteur des catalogues, le magazine ?

Ou pas si la réputation de loisirs à pyramide des âges inversée est dans les croyances financières.

Faut-il investir dans quelques milliers d'actions Stanley Gibbons à trois pence et devenir actionnaire majoritaire d'une compagnie de renom ?

I don't know, je relis les articles sur la philatélie du Roi George VI qui ont animé le millésime 2017 de Gibbons Stamp Monthly.

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