Aux côtés des souvenirs militaires, évoqués dimanche dernier, le courrier et les timbres-poste participent des vitrines de la galerie, au Mémorial de la paix à Busan, en République de Corée, en hommage aux troupes des pays ayant participé à l'expédition des Nations unies de soutien à la Corée du Sud, entre 1950 et 1953.
Ces objets sont variés tout autant qu'ils jouent des rôles divers dans la reconstitution de la vie quotidienne de ces soldats et du souvenir que les événements ont laissé en Corée et au-delà.
Note : oui, les objets ici décrits ont été photographiés au smartphone à travers une vitre et l'éclairage du musée... On peut faire mieux en prise de clichés et en trouvailles collectionneuses.
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Un entier postal recommandé utilisé par un militaire australien en 1956 pour jouer à la loterie, un quasi -monopole de Tattersall's, fondé par George Adams (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024 - merci à Ian Billings pour l'identification de la destination du pli). |
Ainsi, plusieurs objets sont similaires à ceux employés pendant l'expédition en Corée, mais pas forcément utilisés aux bonnes dates. Telle cette enveloppe-entier recommandé australien, utilisé par un soldat de ce pays pour une correspondance vers l'État de Victoria, en 1956, et transmise par la poste militaire.
Il faudra consulter des ressources spécialisées pour savoir si des troupes et l'APO 215 (Army Post Office) étaient encore en Corée cette année-là, ou si ce bureau gérait une zone d'Asie de l'Est plus stable, telle l'occupation du Japon.
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Les timbres d'Inde surchargées pour servir au Corps expéditionnaires en Corée (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024). |
Encore plus générique, la vitrine consacrée à l'Inde présente la série neuve de timbres-poste indien, surchargés pour servir à la poste militaire en Corée.
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Trois enveloppes et trois lettres de courrier militaire grec de la guerre de Corée (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024). |
Plus marquantes sont donc ces trois enveloppes en franchise militaire et trois lettres manuscrites liées à des soldats grecs en Corée, en 1952 d'après les cachets oblitérants.
Les hellénistes liront les numéros des bureaux de poste militaire et déchiffreront le contenu de ces courriers, s'ils vont de la Corée vers la mère-patrie, à peine sortie de l'occupation nazie et de la guerre civile avec les communistes.
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Affiche dans l'entrée du Mémorial appelant aux dons des souvenirs des vétérans de la guerre de Corée. |
Ce manque d'objets postaux directement lié à des individus et leur petite histoire, ainsi que la disparition progressive des vétérans, est illustré par le lancement en 2023 d'un appel aux dons de leurs souvenirs par les vétérans de la guerre de Corée, ou leurs familles.
L'affiche dans l'entrée du Mémorial montre un ensemble de memorabilia qui rappellera aux Français la Grande Collecte du centenaire de la Première Guerre mondiale, juste avant 2014.
Ensuite la pure philatélie vient à la rescousse de la mémoire.
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Carte postale de l'arrivée des troupes belges en Corée, oblitérée lors d'une exposition philatélique, le quatorze avril 1951 (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024). |
Des soldats belges, tout juste débarqués en Corée, illustrent une carte postale utilisée comme souvenir lors d'une exposition philatélique à Woluwe (soit dans Bruxelles, soit en Brabant flamand).
L'item montre le lien entre les troupes et la population au pays si un collectionneur belge a des informations sur cette exposition.
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Enveloppe premier jour de l'émission Volontaires de Corée du vingt-cinq septembre 1952 (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024). |
C'est par l'émission de 1952 que les soldats tucs volontaires sont, entre autres, honorés dans la vitrine de la Turquie : quatre timbres sur une enveloppe premier jour.
L'illustration de celle-ci est claire : autour d'une carte de la péninsule coréenne, des soldats mitraillent et mettent ainsi en fuite des soldats vers la République populaire de Chine, pendant que le drapeau turc est levé à la frontière entre la Corée et la Chine au nord.
Ceci était fort optimiste alors que le front s'était stabilisé depuis 1951 à la frontière actuelle.
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Timbres de Colombie de 1954 célébrant les forces armées colombiennes... pour un coup d'État (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024). |
Cependant, tout ce qui brille n'étant pas d'or, il y a quelques surprises à utiliser les si commodes timbres-poste.
En Colombie d'abord, ces deux blocs de timbres colombiens, nation participant à la Force des Nations unies en Corée, honorent les Forces armées colombiennes pour l'anniversaire du treize juin 1953, un an après l'armistice de Panm...
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Euh, l'anniversaire d'un coup d'État militaire à Bogota, un mois avant l'armistice inter-coréen.
J'imagine qu'un Coréen, un Chinois, un Cambodgien aurait aussi des choses à redire sur les expositions d'arts asiatiques en Europe.
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Le drapeau de l'empire d'Éthiopie et les timbres coréens de 1951 remerciant les pays venus à son secours (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024). |
Deuxième surprise : l'Éthiopie, un peu comme le badge dans la vitrine de la Turquie ou de la Colombie, fait partie des pays où j'imagine que la vitrine a été difficile à créer : quelle mémoire des vétérans de la Corée dans ces pays depuis bousculés par les événements politiques, économiques et sociaux ?
D'où un effort pédagogique de rappeler déjà que c'est l'Empire d'Éthiopie qui a répondu à l'appel du Conseil de sécurité des Nations unies : rappel du drapeau de l'époque imprimé sur carton et avec les timbres de 1951 que la poste coréenne a émis pour chaque pays participant à l'expédition.
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Timbre de Corée du Sud de 1968 : visite de l'empereur Haïlé Sélassié auprès du président Park Chung-hee (Mémorial de la paix des Nations unies à Busan, juillet 2024). |
Un timbre-feuillet de 1968 rappelle ce lien entre Corée et Éthiopie : la visite de l'empereur Haïlé Sélassié en Corée du Sud, alors présidée par Park Chung-hee.
Le planisphère choisi est éloquent : centré sur l'océan Indien, il relit la péninsule coréenne à l'Éthiopie par une branche des lauriers de la paix, de couleur verte (ni bleu, ni rouge... en ces temps de guerre Froide).
Lors de cette visite, l'empereur est ainsi le huitième non coréen et le premier africain à recevoir le grand ordre de Mugunghwa, remis de 1949 à 2008 aux présidents sud-coréens en début d'exercice, qui peuvent en décorer les chefs d'État alliés du pays.
Grand ordre dont le premier étranger à le recevoir fut le président de la République fédérale d'Allemagne en 1964...
Ah ? Pas Truman, ni Eisenhower, présidents des États-Unis d'Amérique pendant le conflit ?
L'Allemagne, l'ancien allié du Japon impérialiste ?
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Pourquoi ? Réponse partielle au prochain épisode sur le Mémorial de la paix des Nations unies, à Busan.
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