mercredi 7 février 2018

Nostalgie du centenaire ou uchronie de la Grande Guerre

La collision de nouvelles provoquent la nostalgie d'un vingtième siècle où les conflits n'auraient pas (tous) eu lieu grâce au meilleur comportement de quelques politiciens, notamment la Grande Guerre dont la dernière année du centenaire ne clora pas les centenaires des événements ayant continué à pousser l'Europe et son voisinage vers de nouveaux conflits à court et long termes.

Certes, l'historien Ian Kershaw a bien montré, avec Choix fatidiques (Fateful choices) pour la période 1940-1941, que l'Histoire est une avancée constante et inexorable des actions humaines conduisant les hommes à commettre la seule et catastrophique action qui leur paraît possible au moment donné, ayant annihilé toute autre possibilité acceptable au fur et à mesure.

Mais, pendant l'automne 2017, Fred Duval et Jean-Pierre Pécaud assistés de Fred Blanchard, les auteurs de l'anthologie dessinée uchronique Jour J ont osé réécrire l'histoire de la pacification et de la démocratisation sans guerre du Moyen-Orient de 2001 à nos jours. « Avril 2006 : Bagdad, première destination touristique du Proche-Orient », sous-titre provocateur du trente-et-unième tome de leur série.

Dans la trilogie du Prince des ténèbres, le surnom du personnage-clé, l'agent du FBI John O'Neill parvient à convaincre le gouvernement états-unien du danger d'Oussama Ben Laden et de son groupe... et d'éviter l'attentat du 11-Septembre dans lequel il est mort au premier jour de son nouvel emploi de chef de la sécurité du World Trade Center, à New York.
Le timbre du centenaire de la mort de l'empereur François-Joseph (merci Irene et Postcrossing).
Dans cet état d'esprit, recevoir une carte postale d'Autriche affranchie du timbre que la République autrichienne a consacré à l'empereur François-Joseph en 2016 suscite de doux et naïfs rêves d'une histoire moins sanglante...

... avec la voix de Frédéric Mitterrand dans son documentaire de 1997, Les Aigles foudroyés, dans lequel il contait comment le conflit initial austro-serbe emporta trois familles impériales sur fond des premiers films de familles.

Le vieil empereur - et sa cour - aurait-il écouté davantage François-Ferdinand son héritier marié en-dessous de son rang, l'Empire austro-hongrois aurait-il pu se transformer suffisamment pour survivre aux nationalismes, voire éviter l'annexion de la Bosnie et de l'Herzégovine ? Eûsse-t-il disparu plus tôt, François-Ferdinand ou son neveu Charles aurait-il pu réconcilier Autriche et Russie avant l'inévitable, voire négocier des paix séparées avec quelques-uns des belligérants ?

Vains questionnements intellectuels pour s'occuper l'esprit ou redécouvrir la complexité des belligérants à l'été 1914.

Car c'est un autre historien qui anime la réflexion - et dissipe les nuages du rêve : les douze leçons sur les crises d'Orient de 1914 et leurs conséquences d'Henry Laurens au Collège de France viennent d'être diffusées sur France Culture du vingt-deux janvier au six février.

Rien que la première inquiète sur la situation de 1914 avant même les coups de feu de Sarajevo : la mémoire nationale française fixée sur le front allemand est secouée par le rappel que les futurs fronts étaient partout à vif et prêts à engloutir empires, soldats et civils, également au sud-est du continent. Royaume-Uni tentant de rallier l'Empire ottoman, pourtant hostile à l'Empire russe, affaibli par les indépendances balkaniques et dont la nouvelle génération de gouvernants rêve de grandeur turque...

Je frémis de ce que les onze émissions suivantes vont me révéler sur les multiples grands et petits faits entre Europe et Asie qui ont conduit aux bains de sang, génocides, tensions, frontières disputées, attentats,... depuis.

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