lundi 3 septembre 2018

Pour les amateurs de géopolitique

Au temps jadis - quelques années sur le web donc, j'avais trouvé un site de géopolitique qui, une fois l'an, recensait les variations des États : fixations concertées de frontières, changement de nom, déménagement de capitales, modification de la devise monétaire, du drapeau national, de la nature de la constitution, etc.

Des éléments qui peuvent intéresser un philatéliste spécialisé dans un pays ou amateur du « un timbre, un pays ».

En cette deuxième moitié d'été 2018, ces changements se bousculent au portillon. En voici deux définitifs et deux en projets très controversés.


Face à l'hyper-inflation, le gouvernement du Venezuela supprime encore des zéros pour que le bolivar fort de 2008 devienne le bolivar souverain le vingt août 2018, à valeur arrimé au petro, une crypto-monnaie lancée en février et liée au cours du pétrole... sûrement dans le but de se passer le plus possible du dollar des États-Unis. La mesure s'accompagne d'une augmentation importante du salaire minimum et d'essais de contrôle des prix.

Les lecteurs de la presse ont été marqué, pendant les derniers jours du bolivar fort, par les photographies du reporter Carlos Garcia Rawlins de l'agence Reuters plaçant un produit de consommation courante avec la montagne de billets nécessaires pour l'acheter.

Nous pouvons déjà prévoir quel monnaie sera offerte pour un euro au premier numéro d'un magazine sur les monnaies du monde : avec le dollar zimbabwéen, les bolivars.

Les timbres ont dû suivre : par émissions nouvelles ou surcharges, c'est à rechercher... Enfin, si les gens ont encore le loisir et les moyens d'envoyer du courrier.


Zimbabwe, le grenier de l'Afrique devenu pays de la pénurie agricole en hyperinflation à cause de la politique anti-blancs et de reconversion d'urbains noirs en paysans sans formation. Je me souviens des reportages où un fermier ayant été obligé de donner ses terres à ses compatriotes, finissait par venir leur apprendre à cultiver au moins de quoi subsister.

Bon, le nonagénaire Robert Mugabe a été contraint à la retraite mi-novembre 2017 et son successeur par intérim, Emmerson Mnangagwa, a été élu démocratiquement - après trente ans de mugabisme, la démocratie s'apprend lentement - le trente juillet dernier.

Particularité de cette démocrature qu'a remarqué l'auteur du blog Commonwealth Stamps Opinion : Robert Mugabe n'est jamais apparu sur un timbre de son pays !

Mieux... ou pire... son successeur est apparu sur quatre timbres le dix-huit juillet 2018.

...
Le message de la poste zimbabwéenne est clair : rassurez les investisseurs, les voisins africains et les puissances émergentes : Open for Business (via Commonwealth Stamps Opinion, quinze août 2018).

...

Élection le trente, timbres le dix-huit... Reprenons : démocratie : État de droit où le peuple exerce le pouvoir.

Donc un référendum posé à un peuple qu'on a maintenu dans l'ignorance n'est pas démocratique, mais comme le Royaume-Uni est encore membre de l'Union européenne pour quelques mois, nous n'irons pas plus loin sur ce sujet glissant. Ou alors, dans un autre article philatélique à venir.


Modifications de frontières à venir, mais comme elles sont soutenues par la diplomatie de l'Administration Trump, tout le monde hésite à savoir qu'en penser.

Depuis quelques temps, les gouvernements de Serbie et du Kosovo dialoguent prudemment sur une reconnaissance de quelque chose, afin principalement de pouvoir se rapprocher chacun de son côté du Marché unique européen qui les entoure.

Une des idées pour reconnaître l'indépendance du Kosovo pourrait être d'échanger des territoires pour dépasser les limites administratives de l'époque yougoslave afin que la majorité serbe du nord du Kosovo et la majorité albanaise de l'extrême-sud-est de la Serbie rejoignent un État-nation qui conviendrait mieux à leur population.

Plusieurs gouvernements européens et les États-Unis soutiennent ce qui semble pouvoir faciliter la résolution des différends entre les deux entités, mais les journalistes du Guardian aujourd'hui, lundi trois septembre, signalent toutes les difficultés qui heurtent les nationalistes des deux bords et certains gouvernements européens.

Allons-nous revivre, en Europe centrale et orientale, la période des nationalismes de la fin du dix-neuvième siècle à la résolution de la Première Guerre mondiale où des découpages ont eu lieu selon les nationalités des majorités,... dans des pays non concernés par le conflit Serbie-Kosovo ? Avec force preuves des cartes uniformément colorées ne tenant pas compte des mixités locales.

Des timbres kosovars en territoires anciennement serbes, il faudra attendre. Des discours malheureux de certains chefs d'État de l'Union européenne, c'est fort possible.


Autre résolution d'avenir soutenue par Washington : une confédération Palestine-Jordanie est expliquée par Courrier international aujourd'hui à partir d'une revue de la presse israélienne et états-unienne.

Après tout, le plan de partage de la Palestine mandataire entre un « État juif » et un « État arabe », proposé par l'Organisation des nations unies en 1948, n'est plus d'actualité depuis très longtemps. L'espoir de ma génération lors des accords d'Oslo... passons. Le mitage et l'emmurage de la Cisjordanie entretenant la radicalisation de jeunes désespérés, ce qui effraie encore plus les Israéliens et justifient encore plus d'enfermement et de violence militaire... L'histoire peut être cyclique.

Et le courrier !

En août, Israël a bien voulu remettre à la poste palestinienne dix tonnes, huit ans de lettres et de colis destinés aux habitants de Cisjordanie !!!

Il semblerait que ce soit la partie que les postes arabes transmettent via la Jordanie, et que le courrier transmis directement via Israël arrive plus vite. Soupir.

Je n'ose imaginer comment le Département d'État états-unien, le gouvernement israélien, voire, Dieu nous en préserve, le Président des États-Unis lui-même, ont abouti à l'idée d'une confédération Palestine-Jordanie.

D'abord : qu'en pensent les deux États concernés ? La Palestine se contentera-t-elle d'un statut qui nie une indépendance complète ? Quelles répercussions sur les Palestiniens, réfugiés ou intégrés en Jordanie ? Quel statut des territoires des colonies israéliennes ou isolées par le mur de sécurité au sein de cette confédération : en feront-ils partie ?

Pire : la proposition est-elle faite pour forcer les dirigeants palestiniens à la refuser afin d'envenimer la situation à leurs dépens ?

Concernant les très hypothétiques timbres d'une nouvelle confédération, le complexe exemple de la Bosnie-Herzégovine montre que ça peut ne pas arriver.


Paix aux hommes de bonne volonté... Dommage que ces hommes et femmes volontaires ne soient pas au pouvoir.

L'oubli de la veille corrigé le lendemain, mardi quatre septembre 2018 :
Et, évidemment, le Roi Mswati III a annoncé que le Swaziland serait désormais appelé en langue szawi : eSwatini à l'occasion du cinquantenaire de son indépendance.

Si l'annonce a eu lieu en avril 2018, les premiers timbres portant ce nom ont été émis vendredi trente-et-un août dernier, l'anniversaire de l'indépendance étant le jeudi six septembre. Je vous laisse cliquer sur le lien ci-dessus vers les illustrations trouvées par le très-attentif Commonwealth Stamps Opinion.

Compléments du mardi onze septembre 2018 :
Au Kosovo, lundi dix septembre, le président de Serbie a visité la commune à majorité serbe Mitrovica, avec un poil de pression de l'Union européenne sur le gouvernement kosovar. Les deux présidents concernés avaient refusé de se rencontrer ; des vétérans de l'Armée de libération du Kosovo ont empêché son passage du côté albanais de la ville ; et l'idée d'un échange de territoires est enterrée mais les négociations marquent une pause.

Balkans et ex-Yougoslavie toujours : le dimanche trente septembre, les citoyens macédoniens se prononceront par référendum sur le changement international et intérieur du nom de leur pays. Afin de clore la querelle culturelle avec la Grèce et lever le veto de cette dernière à l'adhésion macédonienne à l'Union européenne et à l'Organisation du traité de l'Atlantique Nord, l'actuel gouvernement a accepté le nom de « Macédoine du Nord ».

Un reportage du Guardian d'hier, dix septembre, développe l'impression des différents partis politiques macédoniens sur l'aspect diminutif de l'ajout, que la question annonce bien que le changement de nom permettra l'adhésion aux deux organisations occidentales, et la veille occidentale sur le fait que les politiques et médias russes s'intéressent brusquement à la Macédoine...

Si le référendum se conclut par un oui et que le Parlement grec ratifie l'accord, les timbres macédoniens devraient voir le nom de pays modifié. Et le point principal du conflit résolu : les deux pays reconnaissant désormais que le nom « Macédoine » fait référence à deux histoires différentes et non concurrentes, une antique hellénique et l'autre moderne slave.

Aucun commentaire: