samedi 8 mars 2025

La boîte aux lettres, place Henri Krasucki, à Montpellier

 Ma participation du samedi huit mars au #postboxsaturday des réseaux sociaux : la boîte aux lettres, place Henri Krasucki, faubourg Boutonnet, à Montpellier.

Boîte aux lettres haute et jaune de La Poste française, plantée à l'ombre d'un olivier, place Henri Krasucki, à Montpellier (licence Creative Commons BY-NC-SA 4.0).

Au nord du centre médiéval de Montpellier, l'Écusson, se trouve des faubourgs anciens, dits faubourg Boutonnet au nord-ouest, et, plutôt dix-neuvième siècle dits des Abattoirs, puis Beaux-Arts au nord-est. 

Pour ce dernier, le généalogiste-vidéaste Ketella a diffusé tout dernièrement une recherche ingénue sur une famille de bouchers montpelliérains, qui évoque notamment le déplacement pour motifs d'hygiène des abattoirs vers l'extérieur de la ville. Elle sert aussi de mode d'emploi sur les annuaires anciens en histoire familiale.

La place Henri Krasucki, au cœur du faubourg Boutonnet, à Monpellier (licence Creative Commons BY-NC-SA 4.0).

Comme on le remarque aisément, le quartier a subi une modernisation partielle autour de cette place. D'abord, à partir de ma lecture des cartes et photographies aériennes anciennes proposées par Geoportail de l'Institut géographique national, une extension de l'espace libre avec la destruction de bâtiments bien alignés à gauche hors-champ, probablement lié à l'ancienne École d'infanterie, et de destructions d'anciens immeubles, avec récupération probable des derniers grands jardins.

La rue du Faubourg-Boutonnet quand elle débouche sur la place Hanri Krasucki, en mars 2023 (Google Street View).

Si les deux rues longeant la boîte deviennent, à gauche, une « auto-rue » sans âme jusqu'à arriver aux commerces et activités du quartier des Beaux-Arts, et à droite, une rue résidentielle dense jusqu'à la place Albert Ier [de Belgique] et l'Écusson, derrière le photographe, c'est la partie animée de la rue du Faubourg-Boutonnet avec ces commerces et restaurants du quotidien.

Ils animent le quartier résidentiel alentours, y compris une maison de retraite et une cité universitaire au sommet.

Henri Kraucki en juin 1983 par Olivier Victor Marius Dumay (licence CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=97263603).

Quant à Henri Krasucki (1924-2003), il serait bien temps que les syndicalistes français du dix-neuvième et vingtième siècles aient droit à une série de timbres-poste... avant dilution des droits sociaux en France.

Déjà, rien que sa vie (merci aux Wikipédiens).

Car, avant d'être naturalisé français en 1947, d'animer la Confédération générale du travail (C.G.T.) jusqu'à en devenir le secrétaire général de 1982 à 1992, il a été résistant contre l'Occupation allemande et même au sein du camp de concentration de Birkenau, Jawischowitz et Buchenwald, survivant aux mines du second et à la marche de la mort vers le troisième.

Timbre du cinquantième anniversaire des accords franco-polonais d'immigration de travail - une des rares immigrations dont la France fut fière... (via Phil-Ouest.com).


Son père, ouvrier textile communiste polonais, arrive en France en 1926, rejoint par sa femme et son fils aîné, né dans un village juif en bordure de Varsovie. À Paris, ils tiennent un atelier de textile à Belleville et poursuivent leurs activités communistes et révolutionnaires, dans lesquelles leur fils cadet Henri les rejoint et où il est instruit par le futur « Colonel Fabien ».

Bon élève au lycée, Henri préfère cependant devenir ouvrier-adjusteur. En 1939, le pacte germano-soviétique, puis en juin 1940, l'occupation allemande, font entrer la famille dans la clandestinité sous de fausses identités.

À quinze ans, il entre dans la résistance avec les Jeunesses communistes dans la section juive de la Main-d'œuvre immigrée (FTP-MOI) du Parti communiste dans le 20e arrondissement : sabotages, tractages, mais aussi actions armées.

Sa famille et lui paient le prix de ces actes. En février 1943, son père Isaac meurt dans une chambre à gaz de Birkenau. Deux mois après son père, Henri, sa mère et sa sœur sont arrêtés et torturés sans parler par les inspecteurs des Renseignements généraux français.

Livrés aux Allemands, il fut avec ses camarades parisiens des rares survivants du convoi 55 parti de Drancy, le vingt-trois juin 1943, arrivé à Birkenau. Après les travaux forcés et résistance interne aux camps, il revient à Paris le vingt-huit avril 1945.

Certes, les Français des Trente Glorieuses et des années Mitterrand-Chirac ont retenu le syndicaliste menaçant de grève pour lutter pour les droits des travailleurs, et son silence comme beaucoup face aux tentatives de liberté en Europe de l'Est en 1953, 1956 et 1968.

Centenaire des accords sur l'immigration polonaise en France (boutique web de Philaposte en 2023).


Par contre, malgré son statut de résistant combattant, une journaliste du Figaro Magazine lui reproche, en 1987, d'être un « Français de fraîche date » qui se permet de critiquer la politique de la France, alors sous le gouvernement de droite de Jacques Chirac.

Sur ce moment-là, il raconte l'histoire résistante et tragique de son père. Dans un journal syndicaliste, il rappelle qu'on ne rappelle pas à un autre natif polonais juif ses origines : le cardinal archevêque de Paris, Jean-Marie Lustiger, à la jeunesse également instructive sur les Français de l'entre-deux-guerres et dont la mère fut assassinée en déportation sur dénonciation d'une employée avide. 

Voire à un descendant de la grande noblesse polonaise, du Premier Empire français, de Talleyrand... le prince Michel Poniatowski, parachutiste-commando des Forces françaises libres, plusieurs fois parlementaire, et aussi ministre de l'Intérieur sous le président Giscard d'Estaing.

Tous trois étant de la même génération née dans les années 1920 et ayant risqué leur vie pendant la Seconde Guerre mondiale.

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